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Will Sheff , libéré des illusions du rock’n roll

Le leader de Okkervil River signe son premier album solo,  "Nothing Special" à paraître le 7 octobre 2022 chez ATO.

Aujourd’hui, Will Sheff – connu comme leader de la formation indie-rock respectée Okkervil River, neuf albums épatants au compteur – est heureux d’annoncer la sortie de Nothing Special, son premier album solo, à paraître le 7 octobre via ATO Records (My Morning Jacket, Other Lives, The Murlocs).

Bien que Sheff soit conscient qu’il donne un peu le bâton pour se faire battre avec un tel titre d’album, Nothing Special n’est pas un exercice d’auto-dépréciation: c’est plutôt un disque qui lutte avec les illusions et rêves de gloriole vendus par le rock’n roll et le style de vie qu’il implique, ainsi que le réajustement de valeurs nécessaire pour appréhender la vie d’après et trouver une voie plus mature, qui ait du sens et soit également porteuse d’espoir.

Sheff développe, “Quand j’étais gosse, je me suis laissé embringuer dans ce rêve de devenir une star de rock. Comme tant de jeunes gens, je suis tombé amoureux de cette idée, romantique, d’être appelé par ce chemin soit-disant plus glorieux, en marge de la vie ordinaire menée par les gens “ordinaires”. Et je me suis retrouvé dans un groupe avec d’autres gens qui avaient ressenti ce même appel – surtout notre excellent batteur Travis Nelsen, qui était comme un frère pour moi. Tous les deux, nous partagions ces histoires mythiques sur les stars du rock, leurs excès et leurs morts tragiques, comme s’il s’agissait d’écritures saintes. Hélas, Travis et moi, nous nous sommes fâchés et perdus de vue, ce qui fut douloureux. Et il est malheureusement mort dans les premières semaines du confinement. Je crois qu’une grande partie de Nothing Special tourne autour du deuil de l’avoir perdu, du deuil aussi pour tout ce que mes amis ont perdu, et, enfin, du deuil pour ce mythe du rock’n roll. Il y est aussi question d’ouvrir les yeux et d’aller vers une réalité plus transcendante.”

Pour mettre ses émotions en musique, Sheff a utilisé des arrangements plutôt surprenants, juxtaposant références à la pop baroque, ballades au synthé, sci-fi psychédélique, et le spectre grand-angle des sorties du label ECM dans les années 70 et 80. Nothing Special suit sa propre logique interne, aussi singulière qu’intuitive,tandis qu’on suit Sheff – et sa troupe de collaborateurs – avancer vers l’inconnu, tant individuellement que collectivement.

Accompagnant l’annonce de ce nouvel album, la vidéo pour “Estrangement Zone” , une chanson qui emmène la vision sans grand espoir qu’a Sheff du déclin de notre société vers des sonorités digitales rétrofuturistes plus généralement associées à Oneohtrix Point Never ou Boards Of Canada qu’à Okkervil River. Réalisée par Johnny North, la vidéo montre principalement Marcus Paek qui y joue le rôle d’un personnage appelé The Youth, comme un conte fantastique et mystique dans le désert, quelque part entre Dune et Stalker. Sheff commente: “Je vois la vidéo de Estrangement Zone comme un sort magique que l’équipe et moi-même tentions de jeter, une parabole sur des fins et des commencements qui se produisent simultanément. »

Inspiré par la musique et la façon de raconter des histoires d’artistes tels que King Crimson, Joni Mitchell et Bill Fay, tout autant que par les merveilles naturelles de la Californie du Sud – montagnes, déserts et lacs – Sheff commença l’écriture de Nothing Special dès son installation à Los Angeles, un déménagement qui allait entraîner une séries de changements dans sa vie. Après avoir officiellement mis un terme à l’aventure Okkervil River, via la compilation-rétrospective en 12 volumes (!) A Dream In The Dark, en 2019, il ouvrit son carnet d’adresses pour considérablement élargir son cercle de collaborateurs et, davantage co-écrire. Il approfondit aussi son interêt pour la spiritualité, décrocha de l’alcool et des drogues pour de bon, et adopta un chien. Jouissant d’une liberté retrouvée et devant un nouveau champ des possibles, Sheff se lança dans le travail d’un nouvel album, en commençant par créer une architecture solide.

Pour cela, il enrôla aussi bien des vieilles connaissances (le guitariste Will Graefe et le bassiste Benjamin Lazar Davis) que des nouveaux collaborateurs (le songwriter Christian Lee Hutson, le batteur de Dawes Griffin Goldsmith, le pianiste de Death Cab For Cutie Zac Rae, ou encore Cassandra Jenkins et Eric D. Johnson de Fruit Bats aux choeurs). Sheff opta, cette fois, pour une approche moins participative et plus picturale concernant la production de cet album, contrairement aux disques d’Okkervil River.

L’album aura été enregistré au cours de trois sessions distinctes, captées respectivement par les ingénieurs du son John Congleton(St. Vincent, The War On Drugs), Matt Linesch (Edward Sharpe, Gil Landry) et Marshall Vore (Phoebe Bridgers, Conor Oberst), Sheff restant principalement de l’autre côté de la vitre, guidant le groupe dans des perfomances, principalement live, privilégiant la spontanéité, faisant fi de tout format pop, sans se préoccuper de la durée des morceaux non plus.

Cette approche aura, clairement, été payante. Tout au long de Nothing Special, Sheff traverse des territoires très variés: les passages délicats font place à des paysages peuplés de synthés en décomposition ou de sonorités de guitares comme noyées dans l’eau, tandis que le songwriter parvient à extorquer un peu d’optimisme du deuil, et échafaude un plan pour échapper aux cercles vicieux de la société. Au final, Nothing Special nous rappelle d’être bienveillants avec nous-mêmes et avec les autres, aussi, durant les bourrasques de la vie. Un sentiment approprié s’agissant d’un album destiné à mettre le passé à distance, afin de pleinement habiter le présent : laisser tomber volontairement le cynisme, et choisir l’espoir.

Nothing Special
“The Spiral Season”
“In The Thick Of It”
“Estrangement Zone”
“Nothing Special”
“Holy Man”
“Like The Last Time”
“Marathon Girl”
“Evidence”

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